Azkona-Toloza ce sont deux artistes qui partagent leur temps entre Barcelone, Pampelune et le désert d'Atacama. Spécialisé dans la création audiovisuelle destinée aux arts vivants, le Chilien Txalo Toloza-Fernández est connu pour ses dispositifs scéniques qui sont à la fois immersifs et documentaires. Depuis 2013, il s’est associé à Laida Azkona Goñi, danseuse et chorégraphe formée à la Rambert School (Londres), au SEAD (Salzbourg) et au studio Trisha Brown Company (New York). Leur travail est interdisciplinaire : performance, arts visuels et sonores… Ils ont travaillé avec la performeuse Sònia Gómez, avec le metteur en scène Roger Bernat et avec la compagnie mexicaine de théâtre documentaire Lagartijas Tiradas al Sol. Ensemble, ils explorent les relations entre le néocolonialisme, la culture contemporaine et la barbarie. Tels sont les sujets de leur trilogie Pacífico, un voyage-enquête qui les a conduit successivement au Chili, en Argentine et au Brésil.
Leur plus récente création Teatro Amazonas (2020), sera présentée en premier du 28 au 30 septembre. Troisième volet de la trilogie, il prend comme point de départ deux sites architecturaux majeurs du Brésil, symboles du développement de la culture et de la civilisation contemporaine, mais surtout de la destruction des territoires et de la souffrance des peuples originaires. Inauguré en 1896, en plein boom du caoutchouc, l’opéra de Manaus est un bijou architectural qui devait faire de cette ville un des grands centres de la civilisation occidentale. Azkona et Toloza comparent son destin infortuné à celui du gigantesque stade Arena Amazonia, construit pour la coupe du monde de football en 2014. Leur intention n’est pas de les ériger en protagonistes du récit, mais de se demander qu’est-ce qui pousse des investisseurs, voyageurs et colons venus de partout dans le monde vers cet endroit et quelles sont les raisons derrière les transformations de l’Amazonie brésilienne. Un récit sur la démesure, sur le boom et la crise industrielle de la région, sur les intérêts économiques qui dépossèdent les indigènes de leurs terres et causent la dévastation de l’une des principales forêts tropicales de la planète.
Tierras del Sud (2018) est le deuxième volet de la trilogie documentaire et est programmé pour la deuxième fois au Théâtre de la Ville les 2 et 3 octobre 2020. Quel est le lien entre Luciano Benetton et la famille Curiñanco-Nahuelquir ? C’est le combat qui oppose depuis des années les Mapuches à l’empire Benetton, qui veut saisir leurs terres ancestrales en cette lointaine Patagonie. Le plateau vide devient peu à peu cette terre de Patagonie. Les chaînes de montagnes, les déserts, les forêts et les villes imaginaires se dessinent. Les deux interprètes retracent l’histoire de cette région d’Argentine avec, comme point d’orgue, le processus de récupération des terres ancestrales vendues aux puissances étrangères. Tierras del Sud dénonce le développement de nouvelles formes de colonialisme et les atrocités qui en découlent pour mettre en lumière la résistance des Mapuches contre cette oppression. Chez les Mapuches, présents depuis des siècles, la propriété n’existe pas. L’homme appartient à la terre et non l’inverse.
Pour finir, c’est des origines dont on parle. Le premier volet, Extraños Mares Arden (2014), part du pays d’où est originaire la famille d’un des artistes du duo, Txalo Toloza. Il est question du désert d’Atacama, un des lieux les plus arides de la planète, connu aussi pour les ressources de son sous-sol riche en cuivre et en salpêtre. Une région du Chili qui a été depuis des siècles l’objet de convoitises et de la spéculation financière, comme l’évoquent Azkona et Toloza en creusant autour de l’exploitation minière. C’est en exploitant des mines, notamment une mine de salpêtre, que la famille Guggenheim a fait fortune pour construire ensuite à New York un grand musée d’art contemporain. Et c’est dans ces mines qu'est né et a grandi Victor Hugo Toloza, père de l’artiste. Des destins familiaux croisés à travers lesquels le duo s’interroge sur les liens historiques entre industrie minière et industrie de l’art contemporain, des liens desquels découlent les abus de la colonisation et les ravages sur les populations.
Trilogie Pacífico, de Laida Azkona Goñi et Txalo Toloza-Fernández
Teatro Amazonas, lundi 28, mardi 29 et mercredi 30 septembre à 20h00
Tierras del Sud, vendredi 2 et samedi 3 octobre à 20h00
Extraños Mares Arden, mardi 6, mercredi 7 et jeudi 8 octobre à 20h00
Théâtre de la Ville, espace Cardin
1, avenue Gabriel 75008 Paris, France
Billetterie en ligne ici